Vassily Kandinsky
Improvisation III, 1909

Ce paysage pourrait être l'illustration d'un conte de fée. Kandinsky met en scène un
cavalier bleu, emblème du groupe d’artistes qui travaillaient avec lui au début du siècle.
Le dessin est exécuté par des gros
cernes noirs qui contournent objets et personnages. Tour, cavalier, cheval apparaissent avec intensité, malgré l'économie de détails. L'artiste pratique la stylisation, simplifiant les lignes et organisant l'espace avec rigueur. La simplification systématique métamorphose les objets représentés jusqu'à les rendre méconnaissables. La couleur ne correspond pas toujours à la couleur réelle : le cheval est bleu, le ciel rose, etc. Elle est donc arbitraire et sert à transmettre des sensations, à créer une harmonie heurtée, expressive. Le rose à côté de l'orange peut provoquer un sentiment d'étouffement (rapport dissonant) tandis qu'un bleu à côté d'un jaune, sa complémentaire, crée un rapport harmonieux capable de nous procurer une sensation d'euphorie et de bonheur.
La peinture, légère et parfois transparente, est posée sur le tableau par
de larges coups de pinceaux obliques qui introduisent une agitation dans la composition. Tout est en mouvement, en transformation perpétuelle.
On peut dire qu'il y a dans l'image un élan
lyrique transmis par la couleur. Kandinsky disait que le tableau pouvait ressembler à un morceau de musique. La ligne est l'équivalent du rythme. Il y a des rythmes rapides, saccadés, syncopés, répétés à l'infini... La couleur "sonne" selon l'intensité de ses tons. Elle crée ainsi des contrastes sonores. Un jaune peut être strident, un rouge violent et criard, un bleu sourd, un gris doux comme un murmure... Un rouge à côté d'un vert fait boum ! tandis qu'un rouge à côté d'un orange nous enveloppe dans une chaleur douce. Le regard glisse de l'un à l'autre sans difficulté. Notre "oeil qui écoute" se réjouit de cette musique produite grâce à ces rapports colorés comme une symphonie.