Arts de la scène et nouvelles technologies
Grand Magasin, Les Déplacements du problème / 1 2 3 4 5 Repères

 

 

Pascale Murtin, Bettina Atala et François Hiffler, entretien collectif
Par Marie-José Rodriguez et Stéphanie Chaillou

Les Déplacements du problème confrontent une compagnie dont l'un des enjeux est de « faire du théâtre avec rien » aux outils de création sonore high-tech de l'Ircam. L'action de la pièce pourrait se résumer ainsi : « Trois démonstrateurs présentent une série d'appareils dont l'effet acoustique vient perturber l'exposé lui-même. » À découvrir : le tapis absorbant qui supprime tous les sons, le micro à cohérence variable qui diffuse un mot sur deux, le projecteur sonore qui limite le son à un périmètre restreint, ou encore Simtrad eng, un micro à traduction automatique…

Régulièrement accueilli au Centre Pompidou, Grand Magasin occupe la scène théâtrale française et internationale depuis plus de vingt ans. Il propose au fil de ses créations un théâtre qui nous invite à philosopher sur « le minimum nécessaire » ou le « maximum  indispensable » à toute communication.

Les Déplacements du problème, spectacle présenté du 8 au 11 juin 2009

 

1. Grand Magasin : un synonyme pour vaste stock ou immense entrepôt

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A droite : Pascale Murtin
© Grand Magasin

Pourquoi avoir nommé votre compagnie Grand Magasin ?

A l’époque où nous avions choisi ce nom, ce qui remonte à 1982, nous n’en étions pas encore à l’ère de la très grande distribution et des hypermarchés. L’idée de Grand Magasin était celle d’un endroit où se trouvent des objets en grande quantité, à des prix relativement modiques, et surtout accessibles à tous. C’était comme une métaphore du monde où tout est accessible à tous, le ciel, la mer, les objets, puis les mots, le langage.

Rien, donc, d’ironique dans ce nom, mais le synonyme de vaste stock ou d'immense entrepôt. Il y a dans magasin : entrepôt, stock, accessibilité et quantité, et dans grand : vaste et prestigieux.

Et vous êtes toujours d’accord avec ce nom ?

Oui. Ce qui nous a échappé, alors, est l’aspect mercantile, société de consommation, ainsi que l’aspect 19e siècle véhiculé par le mot magasin. Mais si nous le prenons dans son aspect le plus basique, il fonctionne toujours bien. La tentative est de fabriquer des spectacles à partir d’idées ou d’actions simples qui, combinées les unes avec les autres, comme des briques, vont créer une démarche intellectuelle plus complexe. L’idée de la brique et du trouvable facilement demeure d’actualité.

Dans nos spectacles, nous ne faisons jamais, par exemple, d’allusions littéraires sans les expliciter. Nous ne dirons jamais : « Comme vous le savez, Gilles Deleuze a affirmé ceci ou cela » ; car nous si nous le savons à tel moment, nous ne le savions peut-être pas cinq minutes plus tôt. Ces ensembles de précisions et de précautions que nous prenons font que nous élargissons au maximum cette idée de terrain commun.

Cela dit, est infiniment discutée la notion de tronc ou de langage commun, d’accessibilité maximum. Faisant des spectacles en français nous présupposons que nous nous adressons à des Français. Et à l’intérieur du français notre choix de vocabulaire qui peut être considéré comme très simple, sommaire, peut, dans un autre cadre, être perçu comme très élaboré. Donc, nous ne pouvons jamais présupposer une universalité de communauté.

 

 

 

Arts de la scène : aux limites du théâtre
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