Arts de la scène : aux limites du
théâtre
Steven Cohen, Golgotha /
1
2
3
4
5
6
7
Repères
3. Steven Cohen, artiste offshore
La circulation internationalisée des artistes n’a rien de neuf. Mais le positionnement de Steven Cohen est typique de sa forme la plus actuelle, celle de l’ère de la globalisation migratoire et médiatique. Déterritorialisées, les identités d’aujourd’hui peuvent s’entretenir et s’enrichir, sans nécessité d’un ancrage fixe sur un territoire géographique donné.
Être un Africain blanc
Steven Cohen vit et travaille
principalement en France depuis le début des années 2000. Il y fut accueilli
par Régine Chopinot, au sein du Centre chorégraphique national de La Rochelle,
qu’elle dirigeait alors. Les deux artistes s’étaient rencontrés alors que la
chorégraphe française avait été invitée à animer un atelier artistique à
Johannesburg. Pour autant, la démarche artistique de Steven Cohen ne présente
aucun signe de « métissage ».
Alors même qu’il y est physiquement peu présent, ses réalisations continuent
d’être nourries de la dynamique intense de recompositions identitaires qui
travaille la société sud-africaine de l’après-apartheid. Son projet d’artiste
est d’en révéler les contradictions, en y investissant radicalement ses
déterminants personnels : « Je
suis blanc, je suis juif, je suis pédé. L’art
est un bon endroit pour investir cela, qui fait autant de sens que si j’étais
femme, musulman, ou lesbienne ».
Pourtant, lorsque Steven Cohen
développe cela en France, il ne nous renseigne pas tant sur une spécificité
sud-africaine. Comme en situation de plate-forme offshore, il en retourne les paramètres vers un tout autre
contexte, qui en aiguise encore les significations : « Être un Africain blanc, de surcroît un Sud-Africain blanc, c’est
être contraint de se poser des questions sur ce que cela signifie d’être blanc.
En revanche, je constate, en Europe, que les Blancs ne s’étonnent pas d’être
blancs, et ne réalisent pas que cela pose autant de questions que le fait
d’être d’une autre couleur. C’est là que j’interviens ».
Anciennement sa famille avait quitté l’est de l’Europe pour échapper aux
persécutions antisémites. Les lacunes françaises dans la mémoire de la
Collaboration, ou l’actuelle exacerbation de tensions intercommunautaires le
conduisent à s’interroger : « Comme
juif, je ressens ici qu’être juif continue de soulever bien des
questions ». Sa pièce Dancing inside out (2004) constitue un défi
saisissant adressé aux ambiguïtés des consciences françaises.
Arts de la scène : aux limites du
théâtre
Steven Cohen, Golgotha /
1
2
3
4
5
6
7
Repères