Arts de la scène : aux limites du théâtre
Philippe Quesne / Vivarium studio, La Mélancolie des dragons / 1 2 3 4 5 6 Repères

 

 

Invitant une amie, Isabelle, à partager un spectacle de leur cru, un groupe de chevelus au look hard rock, retenus par une panne de voiture dans un décor enneigé, guide cette curieuse spectatrice au sein du « parc d'attractions » portatif contenu dans le coffre de leur AX. Commence alors un passage en revue des attractions du parc qui est aussi un inventaire des artifices et autres effets spéciaux dont dispose l'art théâtral : machine à bulles, machine à fumée, ventilateurs, etc.
Usant d'un langage dont il révèle dans le même temps la structure et le fonctionnement, Philippe Quesne, et son Vivarium studio, s’ingénie à démontrer et démonter l'illusion sans lui faire perdre de sa puissance…
Aude Lavigne nous invite à découvrir, de plus près, l’univers du metteur en scène.

 

 

Entretien avec Philippe Quesne, metteur en scène, par Aude Lavigne*
1. Voir le monde par le dÉtail

Une histoire personnelle de l’observation

Philippe Quesne, racontez-nous comment s’est élaborée votre attention au monde ? Comment s’est construit votre imaginaire et de quelles expériences s’est-il nourri ?

Vieille AX ou espace vitré, lieux d’observation ou vivariums :
des « boîtes » dans lesquelles tout un petit monde s’agite

© Martin Argyroglo

Philippe Quesne. Depuis que j’ai dix ans, et grâce à l’école, j’ai développé un intérêt pour l’observation du monde animal. Pour être précis, j’ai élevé dans ma chambre et pendant plusieurs années différentes espèces de phasmes. Les phasmes sont des insectes qui ont la particularité de ressembler à des brindilles ou des feuilles selon les espèces.  Ils se confondent ainsi à leur environnement. C’est une espèce qui se multiplie très vite, trois feuilles de lierre et un verre d’eau suffisent à établir une colonie. Ma chambre s’est ainsi rapidement transformée en vivarium géant. Cette longue expérience d’observation a certainement orienté ma façon de voir le monde et de l’observer avec attention. Ma compagnie s’appelle d’ailleurs Vivarium studio. J’étais fasciné par l’agitation de tout ce petit monde animal et je n’intervenais jamais.
Par ailleurs mon père était décorateur de spectacles et, dans le silence et le noir des salles de théâtre, j’ai assisté à de nombreuses répétitions. J’aimais beaucoup ces moments d’observations, et des liens d’évidence s’opéraient entre les répétitions et la vie des insectes.

Par la suite à 16 ans, j’étais à l’Ecole Estienne, école d’art appliqué. Je me souviens des trois ans d’études de dessins techniques, de dessins documentaires où nous devions recopier avec la plus grande précision des catalogues de typographie. Mais c’est aussi à cet âge et avec des amis de l’école que nous avons lancé un fanzine qui s’appelait « Le Nombril du kangourou ». Nous avons reçu le prix du meilleur journal lycéen qui nous a valu le privilège de passer à la télé dans l’émission « Droit de réponse » de Michel Polac. Ensuite j’ai poursuivi mes études aux Arts décoratifs de Paris, des études artistiques plus ouvertes aux recherches personnelles. Dans cette école, j’ai d’ailleurs monté mon premier spectacle à partir des livres La Vie des Termites de Maurice Maeterlinck et Le Dépeupleur de Samuel Beckett.

* Aude Lavigne est productrice à France Culture et à France Musique

 

 

 

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