Arts de la scène : aux limites du théâtre
Steven Cohen, Golgotha  / 1 2 3 4 5 6 7 Repères

 

1. Steven Cohen, performer

Steven Cohen fournirait-il un exemple « chimiquement pur » de ce qu’on appelle un performer[1], un artiste de la performance ? Pour cet artiste sud-africain né en 1962, qui œuvre sur les lisières les moins stables des arts de la scène, ce ne serait pas le moindre des paradoxes que de se voir assigner une catégorie artistique définitive – la performance – alors même que celle-ci résiste fortement, de son côté, aux tentatives visant à la délimiter clairement.

La performance : une pratique de l’art à découvert

Spécifique à la radicalité des engagements esthétiques du vingtième siècle, la performance voit ses artistes impliquer directement leur corps dans des actions volontiers uniques, génératrices de situations effectives, directement porteuses de sens. Parfois non rééditées, souvent sans assurance de réussite. Cette implication peut induire des prises de risque touchant sciemment à leur intégrité corporelle. Dépouillée d’une bonne part des conventions de la représentation spectaculaire, il est commun que la performance se déroule hors les cadres et lieux habituels de la représentation artistique. Ainsi peut-elle perturber les attentes des publics, voire transgresser les tabous et briser les apparences des consensus sociaux. La performance sait se charger de radicalité critique, voire d’intention revendicatrice. Sa prise de risque touche donc aussi au niveau symbolique et/ou politique.

Inventant une pratique de l’art à découvert, la performance conjugue une mise en crise des moyens de l’art, de la personnalité de l’artiste et de ses actions, avec une mise en crise des codes de représentation et de comportement qui assurent la reproduction du cadre social et politique conventionnel. La performance décèle, la performance révèle, la performance perturbe. Steven Cohen dit volontiers agir à la façon d’un « speculum », ne visant pas à opérer des « sutures du sens » mais au contraire exacerber des « questions béantes ».

 

[1] En optant pour le terme anglais de performer, nous visons à rattacher Steven Cohen à la circulation internationale des pratiques artistiques. Du coup, le mot fait ici référence à l’art-performance, et non à l’acception plus ancienne et moins spécifique du verbe to perform, qui désigne la généralité du fait de se consacrer à une prestation scénique.

 

 

 

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