Arts de la scène : aux limites du
théâtre
Didier Galas, La Flèche
et le Moineau /
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Repères
Écriture du spectacle et conception visuelle : un travail en phase
La Flèche et le Moineau
Représentation au Bateau Feu, Scène nationale de Dunkerque, 22 janvier 2009
© Eric Legrand
Au départ du spectacle, il y a un texte écrit par Didier Galas à partir d’extraits du Journal et de Cosmos de Gombrowicz. Comment vous a-t-il transmis sa propre réécriture pour que vous puissiez travailler à l’aspect visuel de la pièce ?
Avant et pendant qu’il écrivait, j’ai relu ou lu Gombrowicz, son écriture et la conception visuelle de la pièce se sont passées en phase. Notre décision commune a vite été de privilégier un dispositif extrêmement simple pour laisser la place aux acteurs et aux danseurs, et pour exprimer cette sincérité du Journal où Gombrowicz parle de problèmes existentiels d’une façon très humaine. Un premier parti pris a été d’avoir deux tables sur la scène, de s’en servir comme d’un objet modulable pour créer des espaces. Didier m’avait dit qu’il voulait dans le spectacle une forme qui revienne tout le temps pour évoquer ces repas du soir où tous les personnages, dans Cosmos, se retrouvent. Dans le spectacle il y a les tables et ces moments de rassemblement autour des tables.
Un deuxième parti pris a été de disposer sur la scène des morceaux de bois qui sont également présents dans Cosmos. De là est née l’idée que je manipule ces morceaux de bois sans que les acteurs me voient, pour qu’ils les découvrent, s’interrogent sur leur présence et, du coup, les spectateurs avec eux : « Qui a mis ça là ? ». Mes interventions sont très réglées pour qu’acteurs et danseurs ne me rencontrent pas et que les spectateurs soient visuellement attirés à des endroits de la scène qui leur fassent oublier ma présence. Un élément essentiel arrivé assez tard dans la conception de la scénographie est le plancher qui délimite l’espace de jeu. Les personnages le quittent parfois pour aller voir des signes dans la salle. Ce plancher, formant un carré au sol, est aussi pensé comme une figure de l’échiquier. On sait que Gombrowicz jouait beaucoup aux échecs.
Retrouver les espaces d’obsession de Gombrowicz
Dans Cosmos il y a deux grands espaces d’obsession : le petit bois où l’oiseau est pendu et les bouches de Catherette et Léna. Comment ces espaces imaginaires sont-ils restitués dans le spectacle ?
Le dernier élément, qui n’est pas un des moindres de la scénographie, est un moineau pendu dans la salle au-dessus du public. Presque invisible au départ, il est mis en lumière au moment où les acteurs le voient, l’apparition devient saisissante pour les spectateurs. Le petit bois, quant à lui, est évoqué par les morceaux de bois disposés aussi bien sur la scène que dans la salle ainsi que par le moineau pendu. L’espace mental sur l’intérieur de la bouche, qui est aussi un espace érotique, est évoqué par le rapprochement des corps des acteurs et des danseurs tout au long du spectacle.
Enfin, je n’en ai pas encore parlé, mais c’est une des premières choses qu’on voit, l’une des tables est trouée, un trou rond comme un perchoir qui, très rapidement, sert aux acteurs pour faire dépasser une main… Il y a des mains dans la bouche et des mains dans ce trou. C’est aussi l’œil du voyeur, l’œil de la femme qui observe, des gens qui observent au travail. Parce qu’il y a du voyeurisme partout dans Cosmos, le trou dans la planche est pour moi la forme de cette présence.
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