Danse contemporaine - Pour une chorégraphie des regards
Un bouleversement des codes / 1 2 3 4 5 6 7 8 9 10

 

3. Une position dans l’histoire

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Love, chorégraphie Loïc Touzé. Photo Bertrand Prévost © Centre Pompidou

 

Rupture ou réexamen? Quelles attitudes adoptent les artistes chorégraphiques face à l’histoire de leur art? Comment continue de s’opérer une transmission, un savoir qui passe de corps en corps?

Les anciens contre les modernes?
Les anciens contre les modernes? Il est commode d’opposer une génération des directeurs des Centres chorégraphiques nationaux (issue de la Nouvelle danse des années 80) à une génération critiquant par la suite ces institutions (les Nouvelles tendances dans les années 90-2000).
05 Mais cela reste très grossier: certains directeurs de Centre chorégraphique, comme Mathilde Monnier ou Régine Chopinot, peuvent avoir des affinités avec les seconds, tandis que parmi ceux-ci, on voit Emmanuelle Huynh nommée à la tête de celui d’Angers. Enfin plusieurs de ces derniers peuvent être des artistes d’âge tout à fait confirmé: Loïc Touzé, Alain Buffard ou Jérôme Bel, entre autres, ne sont plus de tout jeunes gens.
Love, chorégraphie Loïc Touzé. Photo Bertrand Prévost © Centre Pompidou

 

06Une réévaluation plutôt qu’une simple rupture
Beaucoup plus intéressante est l’attitude qu’ils adoptent face au passé, au regard de l’histoire de leur art. C’est souvent celle d’un réexamen, d’une réévaluation, plutôt que d’une irrémédiable rupture. Un goût pour l’histoire se manifeste. L’ouverture de nouvelles voies passe aussi par l’ouverture d’une réflexion sur les anciennes.
Par exemple, nombre d’artistes (Boris Charmatz, Rachid Ouramdane, Myriam Gourfink) évoquent volontiers, et positivement, leur passage auprès d’une chorégraphe-enseignante de la trempe d’une Odile Duboc.

Pour tout vous dire, chorégraphie Odile Duboc. © Contrejour

 

L’héritage d’une rupture radicale: le Judson Church
Plus loin d’eux, bon nombre de ces artistes chorégraphiques ont pointé dans l’histoire l’époque du Judson Church, cette fois pour y faire franchement référence. Dans les années 60 à New York, cette expérience collective, fulgurante et foisonnante, cristallise une remise en cause radicale des codes installés de l’art chorégraphique. Elle produit la post modern dance, en désertant les salles de spectacle traditionnelles, en croisant les disciplines artistiques, en rejetant la narration et l’incarnation de personnages, en valorisant l’improvisation, les dispositifs, les processus aléatoires, le recours aux gestes quotidiens, et en systématisant l’expérimentation. Steve Paxton, Lisa Nelson, artistes américains restés fidèles à leurs recherches d’alors, sont volontiers invités à partager leur expérience avec la nouvelle génération française, au Centre Pompidou.

Ou encore revisiter des pièces essentielles du répertoire du 20e siècle
Souvent mal connue, souffrant de faiblesse théorique, réduite à des biographies et catalogues d’artistes ou d’œuvres mythiques, l’histoire de la danse recèle pourtant de passionnantes questions sur son rapport à la société (l’histoire des corps…) comme sur ses propres modes d’évolution et de transmission (comment son savoir passe de corps en corps).
Constitué de danseurs contemporains, le Quatuor Knust se donna pour mission de redonner vie à des pièces essentielles du répertoire du vingtième siècle. Mais il envisagea cette entreprise comme un chantier à vue, de réflexion et d’expérimentation autour des systèmes de notation de la danse (la kinétographie Laban), ou autour des forces et des références multiples qui sont au travail dans une œuvre, comme dans son interprétation, puis son souvenir. Au Centre Pompidou, le projet "… d’un Faune" (éclats) en fut l’un des plus aboutis.
… d’un Faune (éclats), chorégraphie Quatuor Knust.
Photo Bertrand Prévost © Centre Pompidou

 

 

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© Centre Pompidou 2004